De nouvelles poursuites judiciaires pour décès imputables à une faute dans le crash du Boeing 737-8 MAX, exploité en tant que vol 302 d’Ethiopian Airlines, ont été intentées le 16 mai à Chicago, dans l’Illinois, pour le décès de Virginia Chimenti, originaire de Rome, en Italie et de Ghislaine De Claremont, de Wallonie, en Belgique. Mmes Chimenti et De Claremont faisaient partie des 157 personnes tuées dans le crash de l’avion ET302 le 10 mars 2019 à Addis Abeba, en Éthiopie.

Les poursuites judiciaires ont été intentées devant la Cour de district des États-Unis du district nord de l’Illinois par le cabinet d’avocats new-yorkais Kreindler & Kreindler LLP, avec le cabinet Power Rogers & Smith L.L.P., situé à Chicago, Fabrizio Arossa de Freshfields Bruckhaus Deringer LLP à Rome (pour le compte de la famille de Virginia Chimenti) et Jean-Michel Fobe de Sybarius Avocats, à Bruxelles, en Belgique (pour le compte de la famille de Ghislaine De Claremont). Les défendeurs dans cette affaire sont la société Boeing Company située à Chicago et la société Rosemount Aerospace, Inc. située dans le Minnesota.

Deux actions en justice avaient déjà été intentées le 2 mai au nom de la famille de Carlo Spini et de son épouse Gabriella Viciani, de la province italienne d’Arezzo, un médecin et une infirmière en route vers une mission humanitaire au Kenya.

Mme Chimenti a consacré sa vie à la lutte contre la faim dans le monde et, à 26 ans, elle était consultante pour le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies. Tout en poursuivant ses études à l’Université Bocconi de Milan, elle avait commencé à travailler pour une ONG à Nairobi, au Kenya, qui protège les enfants vulnérables vivant dans les bidonvilles de Dandora. Elle avait obtenu sa maîtrise à la School of Oriental and African Studies de Londres, puis avait commencé à travailler au Fonds d’équipements des Nations Unies et au Fonds de développement agricole, où elle avait orienté son travail vers la facilitation de modèles durables pour briser les cycles de la pauvreté et de la faim. Elle laisse dans le deuil ses parents et sa sœur.

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Ghislaine De Claremont était personal banker chez ING Bank en Wallonie, en Belgique. Elle était mère célibataire et a élevé deux filles, dont l’une est devenue paraplégique après qu’elle, sa sœur et sa mère ont été prises dans une fusillade entre la police et de violents criminels en 1995, touchant Melissa Mairesse, la fille cadette, dans la moelle épinière à l’âge de 10 ans. Melissa a été condamnée à vivre dans un fauteuil roulant et Ghislaine De Claremont s’est occupée des besoins spéciaux de sa fille et a défendu ses droits. Pour le 60e anniversaire de leur mère dévouée, Melissa et sa sœur aînée, Jessica Mairesse, avaient organisé un safari en Afrique. Mme De Claremont faisait partie de ce voyage lorsqu’elle a été tuée à bord du vol ET302.

Justin Green, associé du cabinet Kreindler & Kreindler LLP et pilote ayant reçu une formation militaire, a déclaré : « Boeing a indiqué à la Federal Aviation Administration (FAA) que le système MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System) du Boeing 737-8 MAX ne pouvait entraîner un événement catastrophique même en cas de défaillance, et la FAA a autorisé Boeing à vérifier la sécurité du système sans pratiquement aucune supervision de sa part. Mais le MCAS est un système mortellement défectueux qui a déjà provoqué deux catastrophes aériennes. Boeing a conçu son MCAS de façon à pousser automatiquement le nez de l’avion vers le bas sur la base des informations fournies par un seul capteur d’angle d’incidence. Boeing a conçu le MCAS de telle sorte qu’il ne tient pas compte de l’exactitude ou de la plausibilité des informations relatives à l’angle d’incidence, ni même de l’altitude à laquelle se trouve l’avion au-dessus du sol. Boeing a conçu le système de façon à ce qu’il pousse le nez vers le bas de manière répétée et qu’il contre les efforts des pilotes pour sauver l’avion. La conception du MCAS de Boeing a permis que la défaillance d’un seul capteur d’angle d’incidence provoque deux catastrophes aéronautiques. Il s’agit de la pire conception de l’histoire de l’aviation commerciale moderne. »

« Nous réclamons des dommages-intérêts exemplaires, car la forte politique publique de l’Illinois permet de tenir Boeing responsable pour sa négligence grave et intentionnelle, et notamment en raison de son refus, même encore aujourd’hui, d’admettre le moindre problème au sujet du Boeing 737-8 MAX interdit de vol, et cela, alors même que l’avion est cloué au sol et que Boeing est forcé d’enfin corriger le problème qui a causé deux catastrophes aériennes depuis la récente mise en service de l’appareil » a commenté Todd Smith associé du cabinet Power Rogers & Smith L.L.P.

La plainte déposée aujourd’hui au nom des familles des victimes résume en partie leurs revendications comme suit :

« Boeing a manqué de signaler à ses propres pilotes d’essai certains détails importants concernant le système MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System), y compris le pouvoir du système d’abaisser rapidement le nez du Boeing 737-8 MAX, et, en conséquence, les pilotes d’essai n’ont pas effectué un examen adéquat de la sécurité du système. »

« Boeing a vendu le Boeing 737-8 MAX aux compagnies aériennes tout en sachant qu’un dispositif de sécurité, connu sous le nom de voyant de désaccord de l’angle d’incidence, conçu pour informer immédiatement les pilotes en cas de défectuosité de l’un des capteurs d’angle d’incidence de l’avion, ne fonctionnait pas dans l’avion. »

« Boeing a fait passer ses intérêts financiers avant la sécurité des passagers et des équipages en décidant de hâter la conception, la fabrication et la certification du Boeing 737-8 MAX, et en déclarant de manière mensongère au public, à la FAA et aux clients de Boeing que l’appareil pouvait voler sans risque, déclarations scandaleusement maintenues par Boeing après le crash du ET302. »

« Étant une nouvelle fonctionnalité, la FAA aurait dû vérifier et approuver la conception et le fonctionnement du MCAS, mais il n’a pas été effectué d’examen minutieux du MCAS durant la procédure de conformité qui précédait la certification du Boeing 737-8 MAX, ni même après le crash du [vol Lion Air] 610. »

Anthony Tarricone, également associé du cabinet Kreindler, a déclaré : « Le dossier portera en partie sur la relation étroitement liée entre la Federal Aviation Administration (FAA) et Boeing, qui permet aux ingénieurs de Boeing d’agir en tant qu’inspecteurs de sécurité de la FAA durant le processus de certification. Le fait que le 737-8 MAX ait obtenu sa certification de sécurité sans analyse ni essais rigoureux du MCAS et de ses modes de défaillance démontre que la FAA a été capturée par le secteur qu’elle est censée réglementer. Le lobbying du secteur visant à faire passer les profits de l’entreprise avant la sécurité des passagers ne fait pas la promotion de la certification de la sécurité des avions. »